Psychiatrie et santé mentale, des besoins de prise en charge différents
La Cour des comptes s’est penchée en février sur « les parcours dans l’organisation des soins de psychiatrie ». Elle note toute une série de dysfonctionnements et émet des recommandations, dont le remboursement des séances chez le psychologue.
Le dernier rapport de la Cour des comptes sur ce domaine remonte à 2011. Son dernier rapport est très documenté.
La Cour distingue deux niveaux de prise en charge des patients :
- le besoin en soins de « psychiatrie », qui couvrent le champ des troubles psychiatriques tels que répertoriés dans la classification officielle (CIM10). Ces troubles sévères touchent 7 à 8 % de la population sur la vie entière. Ils réclament des parcours de soins plus complexes, y compris parfois une ou plusieurs hospitalisations et, pour certains d’entre eux, une réinsertion qui demande du temps.
- le besoin de soins en « santé mentale », relatifs à des symptômes passagers. Ces derniers concernent presque un tiers de la population en termes de prévalence sur la vie entière.
Face à ce constat, la Cour dessine des réponses différenciées :
- les cas sévères doivent continuer à être traités en psychiatrie,
- tandis que les médecins traitants et les psychologues peuvent se charger des patients les moins sévèrement atteints.
Des patients mal suivis
Pour les sages de la rue Cambon, il est urgent de reprendre les choses en main.
Ils déplorent que les dispositifs existants soient « empilés » sans cohérence suffisante. Malgré l’importance quantitative des soins de psychiatrie et de leur coût, la prise en charge des patients à long terme n’est pas meilleure.
- L’examen des diagnostics fait apparaître qu’en 2018 au moins un tiers des entretiens en CMP est réalisé avec des patients qui relèveraient des soins de « première ligne »,
- Un nombre important des patients hospitalisés pour de longues durées le sont faute d’une prise en charge graduée, adaptée à leur état et orientée vers une sortie durable.
- Les entrées dans les soins en provenance des urgences est importante, alors que les signaux précurseurs d’une « crise » sont généralement progressifs et perçus par les familles et les patients.
- Les centres de crise devraient pousser à l’acceptation des soins et favoriser une hospitalisation brève (72 heures) afin de réduire les soins sous contrainte.
On le voit, l’absence d’une approche graduée se traduit selon la Cour des comptes par des pertes d’efficacité « systémiques ».
Une expérimentation prometteuse
L’intérêt de ce rapport est aussi d’avancer des recommandations.
Sur le modèle de la prise en charge graduée proposée par le système national anglais, la CNAM a lancé fin 2018 une expérimentation dans quatre départements volontaires, les Bouches-du-Rhône, la Haute-Garonne, les Landes et le Morbihan.
Les psychothérapies y sont réalisées par des psychologues cliniciens, sur prescription du médecin généraliste. L’assurance maladie en assure la prise en charge.
Les premières remontées dites « qualitatives », réalisées à la demande de la CNAM auprès d’une trentaine de patients, sont positives :
- avec une forte mobilisation des différentes parties prenantes
- et des délais de prise en charge beaucoup plus courts.
Cette démarche, toujours en phase de déploiement, fera l’objet d’une évaluation entre mi-2021 et 2023.
À terme, on attend de ces pistes une réduction des consommations de soins, de médicaments et des arrêts de travail.