Entre 2017 et 2021, la moyenne des plaintes traitées par les chambres disciplinaires de première instance pour des affaires sexuelles est de trente par an. Ce qui n’est pas beaucoup, mais tout de même… Cela m’a fait réfléchir et nous avons décidé à l’Ordre de travailler sur ces sujets-là. En 2017, j’ai fait un premier séminaire où j’avais invité des avocats de victimes, un psychiatre spécialisé, un représentant du ministère de la Justice, nos présidents de chambres disciplinaires nationales, une représentante d’une association du droit des femmes.
A l’issue de cette journée, nous avons publié un guide sur la relation thérapeutique.
Oui, en mars dernier. Le secrétaire général de l’Ordre, Jean-François Dumas, avait lancé un groupe de travail il y a environ un an et nous avons signé un protocole avec la Procureure de Paris. Dès lors que nous recevons un signalement, nous le faisons remonter immédiatement au service de justice, via une adresse mail dédiée, ce qui permet de lancer une enquête et de voir si les faits sont ou non avérés, et de vérifier l’existence potentielle d’autres victimes. Ce protocole de transmission des informations sur les violences sexuelles va se déployer dans tous les départements pour qu’on puisse traiter rapidement ces affaires.
Nulle part parce que le décret n’est toujours pas rédigé et j’en suis très inquiète. Cet accès direct nous permettrait de recevoir un patient en première intention et en fonction de sa plainte, de voir si nous pouvons le prendre en charge ou s’il est nécessaire de poser un diagnostic médical préalable, auquel cas nous le renvoyons vers le médecin.
Je vais demander un rendez-vous. Elle a une feuille de route claire, qui est l’accès aux soins, la lutte contre les déserts médicaux et la prévention. Moi, ce que je souhaite, c’est que la rééducation soit vraiment très incluse dans le programme qu’elle va développer dans les années qui viennent. Parler santé sans parler rééducation, ce n’est pas possible. Donc il va vraiment falloir remettre la kinésithérapie au cœur des politiques publiques.
Catastrophique. Nous avons fait faire une étude sur la souffrance professionnelle des kinésithérapeutes par l’Université Bourgogne-Franche Comté et nous avons vu qu’il y avait véritablement de gros problèmes dans une profession qui se sent oubliée, déclassée et malmenée.
Il y a environ 100 000 kinésithérapeutes en France aujourd’hui. Au 16 mai 2022, nous étions 83% de libéraux, 17% de salariés. Nous sommes donc, en nombre, la première profession de rééducation. Mais la densité n’est pas très importante. Elle de 14,51 kinés pour 10 000 habitants. Si on voulait faire de la prévention avec les acteurs de terrain déjà disponibles, et faire de la rééducation une priorité de santé publique, ce serait clairement insuffisant.
C’était un rôle d’acteur de la société civile que je trouvais très intéressant, un rôle d’écoute active, où nous recueillions le ressenti et les propositions de terrain, que nous faisions ensuite remonter. Quand on voit ce que vivent nos concitoyens dans les déserts médicaux, on se dit qu’il n’est plus temps d’avoir des postures et qu’il faut agir.
Aujourd’hui, le travail continue, avec la tenue prochaine de la conférence des parties prenantes. Il ne s’agira pas d’une grand-messe, façon Ségur de la santé, mais de réunions avec les élus locaux, les patients, les professionnels de terrain et leurs représentants. Pas pour dresser un état des lieux, il est connu depuis longtemps, mais bien pour faire des propositions concrètes à mettre en œuvre à l’échelle d’un territoire.
Propos recueillis par François Petty
Crédit photo : CNOMK