Alors que la Haute Autorité de Santé vient d’annoncer ses recommandations en matière de stratégie vaccinale anti-Covid, rencontre avec sa présidente, le Pr Le Guludec.
La HAS est une autorité publique indépendante, à caractère scientifique. C’est-à-dire que nous nous appuyons au maximum sur la science et la littérature professionnelle pour donner les avis que nous publions. L’autre caractéristique de la HAS, c’est son champ d’intervention qui est extrêmement vaste, et avant tout transversal. Ce qui nous permet d’appréhender le système de santé dans sa globalité. Ce champ va de l’évaluation des médicaments, des dispositifs médicaux au remboursement des actes des professionnels de santé. Nous émettons également des recommandations liées aux bonnes pratiques professionnelles, à la santé publique et à la pertinence du parcours de soins.
Le troisième axe, concerne la mesure de l’amélioration de la qualité dans les établissements de santé et dans les établissements sociaux et médico-sociaux.
Le maître mot chez nous c’est : « nous ne faisons rien seuls ». Nous construisons tout ce que nous faisons avec les professionnels de santé et des secteurs social et médico-social et les usagers du système de soins. La HAS n’invente rien, seule dans son coin. Ce n’est pas une entité technocratique qui décrète d’en haut. Elle met tous les acteurs autour de la table pour avancer.
Nous avons un Collège de la Haute Autorité de Santé qui est responsable des orientations stratégiques, de la programmation et de la mise en œuvre des missions qui sont assignées par le législateur. C’est l’instance délibérante de la maison, qui est également garante de la rigueur scientifique et de l’impartialité de nos productions.
Pour rendre ses avis, le Collège s’appuie sur des commissions spécialisées. Elles sont au nombre de huit. Nous avons aussi créé une commission, assez nouvelle dans l’esprit, qui s’intéresse à l’étude de l’impact de nos recommandations. Et récemment mis en place un conseil très transversal : le conseil de l’engagement des usagers. Il a pour finalité d’accroître la participation des usagers dans le système de santé. Ce qui fait notre légitimité c’est d’avoir des méthodes de travail et de production totalement transparentes.
Nous sommes aujourd’hui dans un contexte d’innovation d’une richesse incroyable, que ce soit en termes de produits de santé, avec l’apparition de nouveaux médicaments et de nouvelles techniques, ou en termes de modes organisationnels. Ces enjeux, nous les avons traduits en 6 priorités qui sont consultables sur notre site Internet. Il nous faut nous approprier ces évolutions, les évaluer, et faire des choix pour pouvoir les déployer au mieux. Comme, par exemple, pour le numérique en santé qui sera de plus en plus prégnant.
On voit à quel point, en quelques mois, avec la crise de la Covid, les choses ont bougé en la matière. Je pense que les Français, patients comme professionnels de santé, y sont prêts. Mais il ne suffit pas que les acteurs soient prêts. Il faut que tous les outils suivent. Il y a des priorités aujourd’hui qui nous semblent porter sur l’équipement de tous les Français et de toutes les structures, particulièrement les structures sociales et médico-sociales qui ont un retard à rattraper en matière d’équipement numérique adapté. J’insiste également sur la nécessaire interopérabilité de tous les logiciels que l’on met en place si l’on veut vraiment s’en servir de manière utile et efficace.
La demande en santé de la société va continuer à croître : augmentation des maladies chroniques, innovations technologiques… Cette réalité va nous obliger à faire des choix importants pour continuer à garantir une égalité d’accès aux soins pour tous, tout en gardant à l’esprit la nécessité d’améliorer les conditions d’exercice des professionnels de santé. Les changements qui s’annoncent sont radicaux. Il faut impliquer la population dans la priorisation des choix en matière de santé et en termes d’allocation des ressources, puisque c’est la collectivité qui finance entièrement notre système de soins.
Pourquoi pas. Je crois que le débat public est un outil particulièrement adapté aux choix publics en santé.
Crédit photo : HAS
Propos recueillis par François Petty