Et pourtant tous les soignants, tous les professionnels de sante?, y compris les ge?ne?ralistes de ville, comme moi, sont entie?rement de?voue?s a? la se?curite? de leur patient. L’ide?e de l’ouvrage e?tait de de?crire de la fac?on la plus didactique possible la manie?re d’inte?grer cette dimension de se?curite? dans la pratique. Quelles formes peuvent-elles prendre, comment l’aborder avec le patient...
Le propos ici e?tait vraiment de re?habiliter l’erreur comme forme d’apprentissage. Le postulat de de?part, c’est qu’en ville, qui est le domaine que je connais le mieux, hormis les erreurs graves, la plupart des « petites » erreurs que nous pouvons commettre ne vont pas avoir de conse?quences se?rieuses pour le patient ou par ricochet sur les autres soignants qui le suivent et enfin, sur le syste?me de soins. Mais il est important d’apprendre de ces dernie?res.
Je vais vous donner un exemple. Je parle souvent aux e?tudiants, dans le cadre de mes activite?s d’enseignant, de la premie?re fois que j’ai du? dire a? un patient : « e?coutez, je suis embe?te?, en reprenant les choses avec vous, je m’aperc?ois que je n’ai pas mis les choses en place comme il le fallait ». C’e?tait la premie?re fois que j’avais commis une erreur. Et j’ai eu droit à beaucoup de bienveillance de sa part, il m’a re?pondu en substance : « c’est pas grave docteur, on peut se tromper, mais merci de me l’avoir dit. Que fait-on maintenant ? »
On gagne a? expliquer les choses, quelle que soit l’activite? que vous exercez. Vous tiendrez moins rigueur a? une personne qui vous pre?vient tout de suite d’une possible erreur qu’a? quelqu’un qui d’une part s’est trompe? et d’autre part qui a continue? a? vous assurer que tout allait bien. Cela dit, je pense que la plupart des patients, ont une forme d’ambivalence vis-a?-vis d’un tel cas de figure. Tous espe?rent, logiquement, que leur me?decin ne se trompera pas, ni dans son diagnostic, ni dans la mise en place d’un traitement par exemple. Mais l’erreur n’e?tant pas la norme et leur lien de confiance e?tant naturellement assez fort avec les soignants, les patients, me?me le?gitimement me?contents, ont pluto?t une forme de compre?hension envers leur me?decin. L’erreur n’est pas la faute.
Je crois tre?s fort qu’il y a eu une e?volution, me?me si elle n’est pas force?ment spectaculaire. Moi je n’avais pas e?te? forme? avec cette ide?e que l’erreur pouvait de?boucher sur quelque chose de be?ne?fique, si je puis dire. La plupart du temps, l’erreur, c’e?tait quelque chose de vu comme tre?s sanctionnant, l’erreur c’e?tait la faute. On n’essayait pas de s’appuyer dessus comme source d’apprentissage. Parce que l’erreur, bien souvent, est due a? un enchaînement de causes. Il m’apparai?t que depuis quelques anne?es, les notions d’erreurs, et d’e?ve?nements inde?sirables, la fac?on d’y re?pondre ou encore mieux de les pre?venir ont e?te? inte?gre?es dans le cursus de la formation me?dicale.
Pascale Gayrard, médecin spécialisé en santé publique, directrice des Éditions Le Coudrier « J’ai cre?e? les Éditions Le Coudrier en 2010 dans l’objectif de re?aliser des ouvrages concrets et pratiques a? l’intention des acteurs de sante?, sur des sujets pour lesquels les savoir-faire sont peu diffuse?s. Je suis tombe?e sur le compte-rendu d’une intervention de Marc Chanelie?re lors d’une journe?e sur la qualite? et la se?curite? en sante?. E?tant a? la fois ge?ne?raliste, chercheur et enseignant, il e?tait pour moi un auteur ide?al sur le sujet de la se?curite? des soins. » |
* Prendre soin des patients en toute se?curite?, Ed, Le Coudrier, 29,50 euros
Propos recueillis par François Petty - Crédit photo : DR