L’Intersyndicale nationale des internes (ISNI) a présenté une enquête* inédite sur la réalité des obstacles et les difficultés des internes en situation de handicap durant leur cursus : « Briser les silences, garantir les droits ». Avec la volonté affichée d’apporter des réponses concrètes pour améliorer leurs conditions d’études.
Premier constat, 77 % des internes en situation de handicap expliquent que leur pathologie était présente avant l’internat et 50 % avant leurs études de médecine. Dans le détail, il s’agit au premier chef de handicaps psychiques pour 39,1 % d’entre eux. Suivis par les maladies invalidantes (27,6 %), les handicaps mentaux (21,7 %). À l’arrivée, un interne sur dix (13 %) déclare souffrir d’un handicap moteur.
Pas d’information sur leurs droits
Face à cette réalité, 70 % des internes handicapés rapportent ne pas avoir d’information sur leurs droits, et ce « quel que soit le moment de survenue du handicap », précise l’enquête. Seuls 29 % des répondants indiquent à avoir eu un contact avec la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) et ils ne sont que 12 % à avoir contacté leurs syndicats locaux. Par ailleurs, un interne en situation de handicap sur deux déclare avoir eu un contact avec la médecine du travail durant son cursus, mais le constat de suivi est très hétérogène, recadre Carla Magaud, pilote de l’enquête et vice-présidente du bureau 2024-2025 de l’ISNI
En outre, « que ce soit au cours de l’externat ou de l’internat, nous devons souvent changer de région pour effectuer nos stages », poursuit-elle. Corollaire, il est particulièrement compliqué, pour ce public vulnérable, de conserver leur médecin traitant initial ou d’en trouver un nouveau dans un contexte généralisé de difficulté d’accès aux soins. Pour tenter de remédier à cette réalité, l’intersyndicale des internes suggère un aménagement amélioré des stages de formation des futurs médecins en situation de handicap.
Aménagements pas totalement respectés
Car, en pratique, si un tiers de ces internes concernés ont bénéficié d’aménagements particuliers de la part de leur faculté, ces derniers n’ont été « totalement respectés » que dans 64 % des cas, indique l’enquête. Qui met en regard les 59 heures de travail hebdomadaire moyen auxquelles doivent répondre les internes durant leur cursus, et les répercussions inhérentes sur leur santé.
De plus, au cours de sa formation, un répondant sur cinq rapporte avoir subi « une stigmatisation en lien avec son handicap ». Dans 10 % des situations, elle émanait de la part de l’administration, dans 15 % de la part des co-internes et dans 25 % « de la part des chefs ». À tire d’exemple de la dureté de certains propos, parmi les témoignages extraits des commentaires libres publiés dans l’enquête, Carla Magaud cite celui-ci : « mon chef m’a dit : je tolère un burn-out, je n’en tolérerai pas deux. Si ça se reproduit, l’internat de chirurgie est terminé pour toi ».
Propositions à l’attention des pouvoirs publics
En réponse, l’Intersyndicale des internes a établi une liste de propositions à l'attention des pouvoirs publics. Parmi celles-ci, l’ISNI demande la mise en place de dispositifs d'informations pour que les internes en situation de handicap connaissent leurs droits. Parallèlement, le syndicat suggère des actions spécifiques de formations et de sensibilisation au handicap à destination des chefs de service, des directions des affaires médicales et des directions de facultés et la création d’un référent handicap dans chaque faculté de santé.
Sur le volet pratique, les représentants des internes demandent la mise en place de dispositifs spécifiques, comme l'adaptation du rythme de stage aux situations de handicap, ou l'étalement d'un semestre d'internat sur douze mois.
Enfin, en termes de méthodologie, ce sont 391 répondants (1 % des internes en poste) qui ont accepté de participer à cette enquête. Un pourcentage qui peut apparaître faible mais « qui nous a fourni des données significatives », a précisé le président du bureau 2024-2025 de l’ISNI, Killian L'helgouarc'h, lors de la présentation de l’étude qui a vocation à servir de préalable à de futures discussions avec les doyens et le ministère de la Santé. Elle a d’ailleurs déjà donné lieu à la signature de la charte Romain Jacob en faveur de l’accessibilité de l’accès aux soins pour les personnes en situation de handicap entre l’ISNI, la Direction Générale de l’Offre de Soins et la conférence des Doyens. Une première étape.

Mélanie Debarreix, nouvelle présidente de l’Isni, Carla Magaud, pilote de l’enquête, Yannick Neuder, ministre (démissionnaire) de la Santé, Killian L’Helgouac’h, précédent président de l’ISNI
* https://isni.fr/enquete-internes-en-situation-de-handicap-2025/
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