Selon un baromètre de France Assos Santé publié en mars dernier, 37% des Français ont déjà été confrontés à une pénurie de médicaments en pharmacie, une proportion en augmentation de 8 points par rapport à 2022.
De plus, 39% des personnes ayant fait face à une pénurie sont reparties sans s’être vu proposer une solution alternative.
Une hausse des pénuries de 31% en un an
Au total, dans un bulletin du 26 janvier dernier, l'ANSM dit avoir enregistré une augmentation des signalements de ruptures de stock et de risque de ruptures de stock, avec 4.925 déclarations en 2023. A comparer avec 3.761 signalements en 2022 et 2.160 en 2021.
Toutes les classes de médicaments sont concernées par les ruptures de stock ou les risques de ruptures.
Parmi les médicaments d’intérêt thérapeutique majeurs (MITM), certains sont particulièrement touchés :
- Les médicaments cardio-vasculaires,
- les médicaments du système nerveux,
- les anti-infectieux,
- et les anti-cancéreux.
Parfois, la situation peut se révéler critique : 40% des signalements en 2023 ont nécessité des mesures pour garantir la couverture des besoins des patients :
- Contingentement quantitatif,
- mais aussi qualitatif (par ex : réservation du stock pour certaines indications)
- ou encore importations de médicaments similaires en provenance d’autres pays.
Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène :
- Difficultés survenues lors de la fabrication des matières premières
- ou des produits finis,
- défauts de qualité sur les médicaments,
- capacité de production insuffisante,
- morcellement des étapes de fabrication, etc.
On estime que 40 % des médicaments commercialisés dans l’Union européenne sont aujourd’hui importés en dehors du continent, tandis que 60 % à 80 % des principes actifs pharmaceutiques sont produits en Chine et en Inde.
Il faut aussi noter l’abandon par les entreprises pharmaceutiques de l’exploitation des produits matures au profit de nouveaux produits bénéficiant de prix élevés et d’une rentabilité importante. Depuis 2018, plus de 400 arrêts de commercialisation par an ont été comptabilisés.
L’ordre de libérer les stocks
Face à des tensions en pharmacie, l’ANSM a prié en décembre dernier les industriels de libérer leurs stocks. Concernant l’amoxicilline, l’ANSM constatait en janvier une amélioration.
Néanmoins, la situation reste encore fragile : « L’implication de l’ensemble des acteurs de la chaîne du médicament doit se maintenir afin d’assurer aux patients l’accès à leurs traitements. De plus, il convient d’anticiper dès à présent les approvisionnements pour garantir la couverture des besoins à l’issue de cette saison. »
Sous l’égide de l’ANSM, il a été acté collectivement de maintenir les mesures qui consistent à libérer les stocks des industriels auprès des acteurs de la répartition et des pharmacies afin de positionner les médicaments au plus près des patients.
- Ce dispositif a été notamment élargi à d’autres antibiotiques, tels que l’azithromycine et la cefpodoxime pédiatrique.
- Et, en cas d’indisponibilité du médicament à base d’amoxicilline, les pharmaciens ont la possibilité de délivrer une préparation magistrale adaptée pour les enfants de moins de 12 ans.
Des mesures complémentaires pour 2024
- Un renforcement des pouvoirs de police sanitaire prises de l'ANSM, permettant notamment d'imposer un contingentement ou un circuit de distribution spécifique à un laboratoire pharmaceutique, et la prise de sanctions financières en cas de non-respect ;
- Une amélioration du dispositif de prise en charge des préparations magistrales réalisées par les pharmacies de ville si l’ANSM le recommande dans un contexte de tensions d’approvisionnement ;
- La possibilité de recourir à des préparations officinales spéciales ;
- La possibilité pour l’ANSM de requalifier un médicament comme “médicament d’intérêt thérapeutique majeur” (MITM). Pour ces médicaments et en l’absence d’alternatives thérapeutiques disponibles pour couvrir le besoin de manière pérenne, les entreprises pharmaceutiques auront notamment l’obligation de chercher un repreneur en cas d’arrêt de commercialisation ;
- La faculté pour le ministre chargé de la santé de rendre obligatoire la dispensation à l’unité ou le recours à l’ordonnance de dispensation conditionnelle.
Pour aller plus loin :
Interview le 15 novembre dernier de Thierry Hulot, Président du Leem, dans la matinale de Radio Classique
https://video.lefigaro.fr/figaro/video/thierry-hulot-est-linvite-de-la-matinale-radio-classique-le-figaro/